Ciné-débat
Lorsqu’on parle de racisme, l’usage commun du concept tend à désigner un problème d’ordre interpersonnel : le souci serait le manque de tolérance, la xénophobie des individus à l’égard d’autres individus, le symptôme de la peur de l’autre, de l’ignorance voire de la bêtise. Mais les sociologues ou les militants et militantes de l’antiracisme insistent sur une dimension plus fondamentale. Le racisme s’exerce avant tout au niveau des structures sociales, dans les pratiques étatiques, sur le marché du travail, dans les phénomènes migratoires, dans les non-dits culturels. Autrement dit, c’est dans l’exercice des pouvoirs (politiques, économiques, médiatiques ou culturels) que le racisme se déploie contre des groupes sociaux identifiés par leurs apparences, leurs origines ou leur culture, en se dissimulant derrière des prétendues rationalités (comme la loi du marché ou du droit). Or, la matière première du cinéma est avant tout l’individu. La quête personnelle, la souffrance du héros ou de l’héroïne confrontée à des adversaires en chair et en os. Extrêmement puissant pour créer de l’empathie à l’égard de la souffrance humaine, comment ce média de l’image peut-il désigner des enjeux plus globaux, voire invisibles, sans les réduire à des conflits entre personnes ? En 2022, À Films Ouverts propose de questionner une sélection de films et de documentaires sous cet angle. Le cinéma ne participe-t-il pas à l’invisibilisation du racisme systémique en le réduisant à une affaire de bonne volonté ou, au contraire, permet-il de saisir les dynamiques profondes qui contribuent à la perpétuation des mécanismes racistes au-delà des défaites et des victoires individuelles ?